[Cinéma] Funan, De Denis Do

En mars dernier, je me trouvais au Cambodge. Nous avons visité S21, et les Killings fields. Les souvenirs qui me restent sont bouleversants, je ressens encore les émotions violentes qui m’ont traversée, nul humain « normalement constitué » ne peut rester de marbre face à ça. Alors, lorsque j’ai vu la bande annonce de Funan, qui narre l’histoire d’une famille de Phnom Penh jetée sur les routes en mai 1975 lors de la Révolution des Khmers rouges, j’ai eu envie de le voir.  Il m’a fallu essuyer mes larmes lorsque les lumières de la salle se sont rallumées …

Une animation toute en douceur

Ce que qui interpelle dans Funan, c’est le soin apporté aux couleurs. Je me suis perdue dans les rizières au coucher du soleil, grâce aux sublimes dessins. Malgré l’effroyable, la violence quotidienne, la peur, la terreur, Funan reste doux, sans esprit de vengeance, rejetant complètement hors champ les pires actes de barbarie des tortionnaires, mettant l’accent sur le courage, la résilience de la jeune femme, l’énergie qu’elle jette dans sa survie. Malgré le sujet, malgré l’horreur, Funan est une animation douce. 

Une leçon d’Histoire

Près de 2 millions de personnes ont disparues durant ces presque quatre années de terreur, tuées par l’Angkar, l’organisation Khmer rouge. Le pays en porte encore les stigmates, et nombre de Cambodgiens  d’aujourd’hui ont connu cette époque pas si lointaine. Il est toujours bon de rappeler que la sécurité n’est jamais acquise, que tout peut basculer, et qu’il est important de protéger notre démocratie. Sans l’être frontalement, je trouve que Funan est un magnifique plaidoyer pour la vigilance citoyenne. En témoignant de son histoire personnelle, Denis Do nous avertit. Une leçon d’Histoire, pour le présent.

Une sonorité vibrante

Funan a raisonné en moi, a fait vibrer des cordes sensibles à l’infini. La beauté de ses couleurs, la douceur de ses lignes, ses plans fixes douloureux et sublimes, sont entrés en résonance avec mes émotions. Sans jamais démontrer, sans expliquer, sans exposer, son message s’avère toutefois particulièrement puissant. En prenant un cas particulier, celui de l’être qui lui a donné la vie, le réalisateur dessine une dimension à la fois toute personnelle, et très universelle à l’Histoire. Nous pourrions être cette famille, un jour, si les choses tournent mal. Alors, évidemment, ça touche, ça bouleverse, ça pose des questions sur la nature humaine. Je n’aurais qu’un regret, même si cela se comprend car le réalisateur est Français, c’est que les personnages ne parlent pas Khmer, c’est un frein à l’intensité du récit.

Pour résumer: une esthétique léchée, des couleurs fantastiques et une absence de pathos, font de cette animation un joli bijou à découvrir. Attention, ça remue le CŒUR.

Avez-vous entendu parler de « Funan » ? Comptez-vous le voir ?  

6 réflexions sur “[Cinéma] Funan, De Denis Do

  1. matchingpoints dit :

    Nous aussi avons visité le Cambodge, un pays qui porte encore les traces de cette horrible histoire et ce film nous parle, bien sûr ! Il faut juste trouver le moment…
    Bonne semaine

  2. Pascale dit :

    Oui c’est un film magnifique. Je l’ai vu en présence du réalisateur. C’était très fort. Il ne semble pas totalement satisfait du résultat. Il aurait aimé son film plus long.
    Je lui ai dit que c’était particulièrement intelligent d’avoir mis la violence hors champ dont un viol…

    Attention, tu fais un contresens avec barbarisme… 🙂

    • auroreinparis dit :

      Plus long ce n’était pas nécessaire, c’est l’écueil, les réalisateurs veulent toujours faire plus long, et ça rend les films moins intenses. La longueur est justement parfaite ! Et oui, un barbarisme et une barbarie, c’est un peu la même chose mais pas contre les mêmes objets huhu ! (merci !!!)

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