La Conjuration des Imbeciles – ( A Confederacy Of Dunces) John Kennedy Toole.
Ce livre, dont on m’a parlé avec fort enthousiasme et grandiloquence, me faisait peur. J’avais peur d’être déçue par un roman dont la naissance même est un exemple d’ironie et d’humour noir. John Kennedy Toole s’est suicidé parce que la seule chose dont il était capable, c’était d’écrire, mais que ce qu’il écrivait, ne trouvait grâce aux yeux d’aucun éditeur. Parce que se considérant comme un écrivain raté, il a préféré mettre fin à ses jours, laissant ses personnages orphelins. Si sa mère ne s’était pas démenée, ils n’auraient jamais vu le jour. Mais heureusement, grâce à l’entêtement d’une mère, ce manuscrit hors du commun finit par être édité, et devient un best seller mondial dès sa sortie dans les années 80.
Dans cette Conjuration des imbéciles, il y a Ignatius J Reuilly, un personnage obèse à l’esprit créatif et verbeux, à l’excentricité jusqu’au boutiste, aux idées originales et catastrophiques. Un homme d’une trentaine d’années, oisif, entièrement tourné vers son nombril, persuadé que ce qu’il consigne dans ses petits Cahiers Big Chief, ce verbiage et ces écrits devront sauver la populace d’une humanité décadante. Il refuse donc de travailler pour se consacrer à l’écriture , ce travail étant entrecoupé de méditation contemplative. Son intelligence grandiose, son génie délirant le coupe de la vie réelle et des relations sociales, il ne conçoit pas la vie comme les autres, et ses idées follement géniales se retournent toujours contre lui. Lorsqu’il se décidera à aller gagner sa croute, ce décalage avec son époque et ses contemporains apparaitra de manière encore plus aigue et drolatique. Ignatius , personnage odieux et égocentré, ne vit que dans les textes des auteurs anciens ( Platon, Diogène, et Boece) et abhorre littéralement tout ce qui compose la culture de son époque ( les années 60). Tous les personnages gravitants autour sont finement dessinés et portent Ignatius à un paroxysme.
J’ai aimé Ignatius, je me suis attachée si fort à lui, que je continue d’y penser, de le dessiner, de me souvenir de son être. Kennedy Toole a réussit le tour de force de créer un être à la fois intolérable et profondément attachant, un être au dessus de la masse, génial, et dégoutant. Un être qui donne la nausée, et force en même temps l’admiration. Ce roman, ce n’est pas qu’Ignatius, c’est aussi sa mère, alcoolique et dévouée, la voisine Annie, son amie Myrna Minkoff, les travailleurs des Pantalons Levy dont la vieille Miss Trixie qui m’a faite bien sourire … Une galerie de portraits Picassiens, de gueules cassées, une folie douce dans ces pages, une hystérie complète et fabuleuse, une critique au vitriole de La Nouvelle Orléans et de la Société Américaine en général, et c’est bon, c’est très bon.

eh bé quelle critique, tu le portes littéralement aux nues ce beau roman, cela me donne envie de le découvrir !
j’ai bien aimé ton introduction, mettre fin à ses jours parce que l’on ne trouve pas grâce aux yeux d’un éditeur c’est extrême comme décision mais sans doute important de le savoir lors de la lecture, merci 😈